Des règles du partage des biens au calcul des indemnités, sans oublier les recours possibles en cas d’abus, vous saurez tout ce qu’il faut connaître pour perdre le moins d’argent possible dans l’opération.
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Existe-t-il des solutions pour réduire les frais de procédure judiciaire ?
Oui, mais vous n’y aurez accès qu’à condition de vous séparer en bons termes. Vous pourrez alors opter pour un divorce à l’amiable, autrement dit «par consentement mutuel», procédure accélérée (six mois maximum, contre un à quatre ans dans les autres cas), donc par nature moins coûteuse, qui permet en outre de ne recourir qu’à un seul avocat au lieu de deux. De quoi faire tomber la note d’honoraires sous la barre des 2 000 euros chacun. Si aucun de vous ne souhaite continuer à occuper l’habitation familiale, tâchez aussi de la céder avant de lancer la procédure de divorce. Ce «partage verbal» (vous vous répartissez le produit de la vente en fonction de vos apports respectifs) vous évitera d’avoir à liquider le bien devant notaire et de payer les 2,5% de droits normalement dus pour cet acte. Soit, pour un logement de 350 000 euros, un gain approchant les 4 500 euros chacun. Comme l’a reconnu en janvier 2013 l’administration fiscale, cette manœuvre est parfaitement légale.
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Puis-je récupérer l’habitation dont nous étions propriétaires ?
Bien sûr, puisque ce logement a vocation à être vendu. Il suffira de racheter la part de l’autre. Mais si vous êtes marié sans contrat, il faudra appliquer la règle de la «communauté conjugale» (régime de base) et lui reverser 50% de la valeur du bien. Une bonne affaire si vous avez peu contribué à l’achat du logement, mais une mauvaise dans le cas contraire. «Le système pénalise celui qui a payé le plus», reconnaît Béatrice Weiss-Gout, avocate associée du cabinet BWG. Pour limiter la casse, il lui reste à tenter de minimiser la valeur du bien. Pas si simple, car il est conseillé à chacun de le faire expertiser par deux ou trois agents immobiliers (comptez 500 euros par prestation), puis d’établir la moyenne. Sauf que tout cela peut prendre des mois et que le conjoint vendeur, qui doit organiser sa nouvelle vie et notamment dénicher un toit, est généralement pressé. Pour obtenir son chèque rapidement, il n’est pas rare qu’il accepte un rabais de 10 à 15%. A noter que durant la procédure de divorce, c’est le juge qui décide lequel des deux occupera temporairement les lieux (souvent celui qui a la garde des enfants). Si c’est vous et que votre conjoint ne roule pas sur l’or, on pourra vous forcer à lui verser un loyer : payé en une fois, au prononcé du divorce, il correspondra à 80% de la valeur locative du bien.
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J’ai contribué seul-e à l’épargne du couple, quels sont mes droits ?
Là encore, sans contrat précisant les choses, vous ne récupérerez que la moitié des sommes que vous avez mises de côté, qu’il s’agisse de livrets bancaires, de portefeuilles boursiers, ou même de votre épargne salariale. «Logique car, aux yeux de la loi, tous ces placements ont été alimentés par les revenus communs du foyer», rappelle Julien de Pauw, avocat chez DBO.
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J’ai consenti des dons à mon conjoint, pourrai-je les lui reprendre ?
Sans l’ombre d’un doute s’il s’agit de donations «au dernier vivant», c’est-à-dire accordées dans le but de protéger votre conjoint si et seulement si vous veniez à décéder (auquel cas ces gratifications vous seront rendues d’office). Exemple type : l’habitation principale, dont il aurait alors hérité en pleine propriété, sans que vos enfants aient leur mot à dire. Pour le reste, tout va dépendre de la date du don. S’il a été consenti avant le 1er janvier 2005, il est possible de demander à le récupérer, quelle que soit sa nature (argent, bijoux, biens immobiliers…). En revanche, toutes les donations effectuées après cette date sont réputées «irrévocables» : ce qui a été donné ne peut plus être repris (cela vaut même pour les quatre trimestres de cotisation retraite que les époux peuvent se transmettre depuis 2010 à la naissance d’un enfant). Et inutile de jouer la mauvaise foi en affirmant qu’il s’agissait non pas d’un don mais d’un simple prêt : sans une reconnaissance de dette écrite, le juge balaiera cette thèse d’un revers de main.
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Vais-je devoir payer pour les dettes contractées par mon conjoint ?
Pour tous les couples unis sous le régime légal (sans contrat), la réponse est oui. La règle est la même que pour le partage du patrimoine commun : il faudra participer au remboursement des dettes de l’autre à hauteur de 50%, qu’il s’agisse de prêts à la consommation ou d’impayés d’impôts. Et ne pensez pas vous en tirer devant le juge en jurant que le crédit du salon a été souscrit dans votre dos : même si vous n’étiez pas au courant, vous devrez supporter la moitié de la facture restant à payer. Les deux seules exceptions notables sont celles où le conjoint s’est endetté dans son seul intérêt ou frauduleusement.
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Dissimuler une partie de mon patrimoine est-il vraiment risqué ?
Oui, bien que le juge n’exige qu’un simple récapitulatif du patrimoine (assorti d’une déclaration sur l’honneur) pour opérer le partage. Si vous avez dissimulé une partie à votre ex-conjoint-e ou au juge, gare à la sanction si le pot aux roses est découvert ! Dans ce cas, comme les produits d’épargnes, l’ensemble des biens cachés revient au conjoint floué.
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Suis-je sûr d’obtenir de l’argent si mon conjoint gagne plus que moi ?
Pas toujours, car contrairement à l’idée reçue un écart de revenu ne suffit pas à justifier le versement d’une prestation compensatoire (laquelle doit normalement être payée en une fois, dans les douze mois du divorce). Il faut aussi apporter la preuve que votre carrière a été sacrifiée au profit de celle de l’autre, ou qu’elle n’a pas été aussi brillante que prévu. Dernier élément important : la durée du mariage, qui doit excéder cinq ans. Quant au montant versé, il est censé corriger la baisse de niveau de vie, mais on peut s’aider d’une formule pour se faire une idée plus précise. Elle consiste à diviser par trois l’écart annuel de revenu, et à multiplier le résultat par la moitié de la durée du mariage. Soit 30 000 euros pour cette épouse sans emploi après six ans de vie commune, et dont le mari gagnait 2 500 euros par mois ; ou 75 000 euros pour cette autre, mariée vingt-sept ans avec un homme empochant 1 800 euros de plus qu’elle par mois. Il est possible d’obtenir une rallonge de 5 à 10% dans certains cas, tels qu’un un mauvais état de santé, un âge avancé (plus de 60 ans) ou un grand nombre d’enfants à charge.
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Puis-je échelonner le paiement de la prestation compensatoire ?
Le juge peut vous y autoriser, mais sous certaines conditions. En faire la requête peut rapporter gros si vous êtes très imposé. Car dans le cas d’un échelonnement sur plus d’un an, la prestation, au lieu d’ouvrir droit à un crédit d’impôt de 25% (avec un plafond de dépense de 30 500 euros), est déductible à 100% du revenu. En étalant sur deux ans le paiement de 50 000 euros de prestation, un conjoint taxé à 41% gagnera ainsi 20 500 euros, trois fois plus qu’avec un seul versement (7 625 euros). Il faudra néanmoins vous montrer convaincant devant le juge pour bénéficier de cette faveur. Et pour cause : en cas de versement fractionné, le bénéficiaire sera imposé sur les sommes perçues… Vous n’aurez donc le feu vert que si l’opération n’augmente pas les impôts de votre conjoint, ou que vous consentiez à lui payer le surplus. Et à condition de démontrer que le paiement en une seule fois est au dessus de vos moyens.
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Mon conjoint gagne peu, aurai-je droit à percevoir une pension alimentaire ?
En présence d’enfant, même si les revenus de votre conjoint sont très modestes, il n’échappera pas au versement mensuel d’une pension (elle a vocation à subvenir aux soins, à l’éducation et à la bonne alimentation de l’enfant). Quitte à ce qu’elle soit symbolique : 50 euros, par exemple, ou la prise en charge des frais de cantine… A l’inverse, s’il gagne correctement sa vie, le montant du chèque peut vite grimper. A la base, il correspond à 10% du revenu net mensuel par enfant (212 euros par mois en moyenne nationale). Pourcentage qui peut ensuite varier selon son mode de garde (comptez 50% de plus si vous l’hébergez, 50% de moins si vous n’avez qu’un droit de visite) et son style de vie. Il est en école privée, prend des cours de tennis ? La pension peut s’envoler à plus de 2 000 euros par mois et représenter plus de 30% des revenus de votre conjoint. Retenez surtout que, quel que soit le montant fixé au départ, cette pension pourra être réévaluée par le juge, à mesure que les besoins de l’enfant augmentent, et notamment pour le financement de ses études supérieures.
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En cas de coup dur, est-il possible de réduire la pension alimentaire ?
Pas forcément. Il faudra en faire la demande au juge, qui n’acceptera qu’en cas de chute de revenus d’au moins 25%. La pension baissera en proportion, jusqu’à ce que vous soyez remis à flot (vos revenus devront être adressés régulièrement au tribunal). Mais ne rêvez pas trop : si vous avez du patrimoine, par exemple un bien immobilier, le juge vous forcera plutôt à le vendre, et cela dans les plus brefs délais. Sachez toutefois que la perte de revenus n’est pas le seul motif valable de dévaluation d’une pension alimentaire. L’accroissement de vos charges de famille, en particulier la naissance d’un nouvel enfant, peut également la justifier.
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La pension alimentaire ne m’est soudainement plus versée, que faire ?
Pas d’hésitation : la pension étant prioritaire sur toutes les autres dettes de votre ex-conjoint, contactez aussitôt le tribunal de grande instance de votre région afin qu’il lui adresse une mise en demeure (cela ne coûte rien). Toujours pas de paiement le mois suivant ? Alors, déclenchez une procédure de «paiement direct», par voie d’huissier : la somme due, ajoutée aux frais (300 euros environ), sera saisie d’office auprès de son employeur, de sa caisse de retraite, ou de Pôle emploi le cas échéant. A noter : pour éviter ; entre temps, des soucis de trésorerie, demandez à votre caisse d’allocations un soutien familial (90,40 euros par enfant et par mois), dont le remboursement ne sera pas exigé avant le règlement de votre pension.
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Mon ex-conjoint veut déménager avec les enfants, puis-je refuser ?
S’il a la garde exclusive des enfants, c’est non ! Même en cas de garde alternée, tant qu’il reste en France, vous ne pouvez pas vous opposer à son déménagement. Ce sera au juge de trancher. Il attribuera à l’un le droit de visite, à l’autre le lieu de résidence des enfants, en fonction de leur intérêt (et de leur avis s’ils ont plus de 6 ans). Seule certitude : vous aurez la garde exclusive des enfants en cas de déménagement pour convenance personnelle (par opposition à une mutation professionnelle). Sinon, il vous restera à négocier ce qui peut l’être : un partage à 50% des frais de transport attachés au droit de visite, ou une baisse de la pension.
* Cet article n’est qu’à but indicatif. Si votre problème persiste, nous vous recommandons de vous adresser à un professionnel.